C’est grâce au témoignage d’Henri Clémencet, tailleur de pierres né en 1741 et décédé en 1830 que nous pouvons revivre les anecdotes de la vie beaunoise au XVIIIe siècle et au début du XIXe. La description des aléas climatiques et de leur répercussion sur les récoltes en 1816 n’est qu’est un exemple des très nombreux événements ayant marqué la vie quotidienne des Beaunois en ces époques troublées tant sur le plan politique qu’économique.
Le 18 novembre 1816, Henri Clémencet décide de faire un rapport très précis qui débute comme suit :
« le commerce du vin est la partie essentielle de ce pays. L’année 1815 n’était rien moins qu’abondante mais d’une qualité assez bonne ; cependant, jusqu’aux environs de mai et juin, on n’en faisait pas grand cas dans l’espoir de faire dans la présente année une récolte plus abondante et de meilleure qualité. Les vignes, dans ce moment, annonçaient effectivement une multiplicité de raisins que la saison semblait favoriser mais les pluies continuelles dans tout le cours du printemps et de l’été ont fait tomber des raisins qui pour lors étaient en fleurs ; en sorte que la vendange ou récolte en vin s’est entièrement anéantie et tellement qu’il n’a resté que quelques grappes qui n’ont pas eu le temps de murir parfaitement. La gelée survenue dans les premiers jours de novembre a mis le comble à la misère et à la désolation. Ceci est dit pour les vins noiriens ou de la côte. Quant à celui vulgairement appelé gamai, il a été la majeure, il a été la majeure partie gelé et conséquemment perdu.
Cet accident malheureux a donné lieu à une progression du prix du vin tellement qu’aujourd’hui le vin médiocre se vend quatre cents francs la queue et dans les cabarets seize sols la bouteille et je présume que le prix s’élèvera à mesure que la consommation se fera. »
Ce type de récit, peu fréquent dans les archives est précieux à plus d’un titre puisqu’il donne des renseignements climatiques. En effet, Clémencet évoque ici les pluies abondantes et les gelées tant redoutées des vignerons. Il en décrit les effets sur les cultures et sur l’économie de la région de Beaune en montrant combien la pénurie et les mauvaises vendanges ont joué sur la hausse des prix.
Enfin, ce texte est également intéressant pour l’histoire viticole puisqu’elle évoque plusieurs cépages comme le gamai et le noirien (pinot noir) et leur résistance plus ou moins grande aux aléas climatiques.
Évidemment, il s’agit là d’un témoignage anecdotique qui pourrait cependant largement prendre place dans une étude plus large sur le climat et la viticulture aux XVIIIe et XIXe siècles.
Sources :
Archives municipales de Beaune, fonds Clémencet.