
© Archives Municipales de Beaune
La charte de fondation de l’Hôtel-Dieu date du 4 août 1443. L’initiative en revient à Nicolas Rolin, chancelier du duc de Bourgogne Philippe le Bon, et à son épouse Guigone de Salins. Ils souhaitent employer leur fortune à la fondation d’un hôpital pour venir en aide aux pauvres et malades. L’époque est difficile avec son lot de guerres et de famines successives depuis le milieu du XIVe siècle : Beaune a été particulièrement touchée par les épidémies et la disette.
Rolin choisit Beaune pour installer sa fondation hospitalière, après avoir obtenu l’autorisation du pape Eugène IV d’y fonder un hôpital avec une chapelle. Le chancelier décide également la création d’un ordre de religieuses hospitalières, inspiré de celui de l’Hôtel-Dieu de Valenciennes, dont il rédige lui-même la règle. L’établissement accueille ses premiers pauvres malades en 1452, et la congrégation des Sœurs de Sainte Marthe de Beaune ne tarde pas à essaimer dans toute la Bourgogne, puis au XVIIe siècle en Franche Comté et en Suisse. La dernière communauté se recommandant de la congrégation de Sainte Marthe de Beaune sera fondée en 1998 au Togo
La situation géographique de l’hôpital est un emplacement stratégique : à proximité des halles et du couvent des Cordeliers, contre les Remparts et sur la Bouzaize pour régler la question de l’évacuation des effluents, l’établissement hospitalier est situé au cœur même de Beaune.
Il semble que, pour l’architecture également, Nicolas Rolin ait souhaité s’inspirer de l’hospice Saint-Jean de Valenciennes : ses bâtiments se distinguent par de nombreux apports architecturaux flamands et par une conception rationnelle caractérisée par la présence de quatre ailes disposées autour d’une cour centrale
Le bâtiment principal, sur rue, est couvert d’ardoises et abrite la salle dit salle des Pôvres, la chapelle, l’ancien dortoir et réfectoire des sœurs
Contrastant avec la façade austère de ce bâtiment, les autres corps de logis arborent un toit couvert de tuiles vernissées
La splendeur architecturale et décorative s’exprime dans de nombreuses parties du monument : le raffinement de la flèche, la hardiesse de l’auvent en double bâtière de l’entrée, la charpente peinte à poutres engoulées de la salle des Pôvres ..
L’Hôtel-Dieu possède une importante collection de meubles, d’objets du quotidien et d’œuvres d’art, dont l’inventaire a été établi depuis 1987 par l’Inventaire général de Bourgogne. Parmi ces milliers d’objets : la magnifique tenture de Saint Antoine avec ses tourterelles et, œuvre maîtresse, le Polyptyque du Jugement Dernier (1446-1452) du peintre flamand Rogier Van Der Weyden.
Le domaine foncier de l’hôpital s’agrandit au fil des donations de maisons, de vignes, ou legs en argent qui permettent à l’établissement de garantir sa stabilité financière et la pérennité de ses activités charitables. Le site doit également sa notoriété à la vente aux enchères annuelle des vins des Hospices, instaurée en 1859 sous sa forme actuelle « à la chandelle ». Cet événement constitue une œuvre de charité fidèle à l’esprit de Nicolas Rolin et de Guigone de Salins. Il représente un temps fort dans le monde viticole et procure aux Hospices Civils de Beaune des revenus non négligeables.
L’activité hospitalière a perduré en ces lieux historiques jusqu’au début des années 1980 et se poursuit aujourd’hui au centre hospitalier de Beaune, une des entités des Hospices Civils de Beaune.
Nicolas Rolin qui, par la création de cet hôpital, souhaitait affirmer sa piété (et « acheter » son salut) aux yeux de ses contemporains et de la postérité, pourrait ainsi se féliciter de la continuité sans faille de la vocation originelle de l’Hôtel-Dieu de Beaune.
