Les Grands Ducs d’Occident est une série publiée dans l’Echos des Coms dans le cadre de l’exposition internationale qui s’est tenue à Beaune à l’hiver 2022. « Beaune, fidèle à sa Dame » est l’article 7 et le dernier de la série (EDC n°264). Pour les autres articles :
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Les Grandes duchesses d’Occident
Beaune, fidèle à sa Dame
Les Grands Ducs d’Occident : Beaune, fidèle à sa Dame
Alors que l’exposition Quand flamboyait la Toison d’Or touche à sa fin le 31 mars – courrez-y vite ! – notre voyage au travers des parchemins laissés à Beaune par l’administration des Grands Ducs se termine également. Nous terminons cette série avec un document de 1478, parchemin qui est le gage de la fidélité de certains Beaunois à la fille de leur dernier duc, Marie de Bourgogne.
1477, année terrible
Le 5 janvier 1477, sous les murs de Nancy assiégée, meurt Charles le Téméraire. Il ne laisse qu’une seule héritière, Marie de Bourgogne, âgée de 19 ans. Louis XI, Roi de France, pourtant parrain de Marie, intrigue pour récupérer une partie de son héritage. Naît alors une querelle de juristes sur la nature de la donation de la Bourgogne à Philippe le Hardi par son père le roi Jean II le Bon en 1363. La Bourgogne est-elle un apanage ou s’est-elle affranchie, sous le gouvernement de ses ducs, de la suzeraineté des Rois de France ? L’apanage est une part de l’héritage royal réservée aux fils des rois qui n’accèdent pas au trône. Ce droit peut se transmettre par héritage mais seulement par les mâles en ligne directe. C’est le principe défendu par Louis XI pour les terres qui relèvent juridiquement du Royaume de France, à savoir la Bourgogne et la Picardie. Dès la fin du mois de janvier, Louis XI fait réunir les États de Bourgogne (assemblée féodale réunissant des représentants de la noblesse, du clergé et des non-nobles les plus importants) pour faire ratifier le retour de la Bourgogne dans le domaine royal.
Les possessions de Marie de Bourgogne sont fragilisées. Elle doit faire face aux volontés de son parrain et à des révoltes dans les Pays-Bas. La jeune duchesse fait d’énormes concessions pour maintenir son autorité. En août 1477, elle épouse le puissant Maximilien de Habsbourg, héritier du Saint-Empire Romain Germanique. Ce jeune prince allemand est un grand chef de guerre doté d’une armée puissante mais totalement désargentée. Marie est la plus riche princesse de son temps. Cette union permet à Marie de stopper les appétits de Louis XI. Elle peut donc conserver le Charolais, la Franche-Comté et les Pays-Bas bourguignons. Cet épisode marque le début d’une nouvelle ère des relations européennes : les rivalités permanentes entre la couronne de France et la famille des Habsbourg (qui règne sur le Saint-Empire, les Pays-Bas et l’Espagne) jusqu’au règne de Louis XIV.
Le siège de Beaune
Revenons à Beaune. Il semble donc d’abord que la question du retour de la Bourgogne dans le giron de la France ne fasse pas débat. Les grandes familles de la province se rallient au Roi de France en janvier 1477. Cependant, au printemps 1478, plus d’un an après le rattachement de la Bourgogne, des émissaires des partisans de la Duchesse Marie parcourent la province pour exciter les consciences. Ils réalisent si bien leur travail qu’une partie de la région entre en rébellion dès le mois d’avril 1478, notamment Beaune. En juin, pendant 5 semaines, la ville est assiégée par les troupes du Royaume. La place forte de Beaune est bien conçue et peut tenir un long siège. Cependant, les forces de Marie de Bourgogne sont trop mal organisées et disparates. La rébellion est donc matée et Beaune doit se rendre avec armes et bagages le 2 juillet 1478.
Ce qui demeure de cet épisode dans nos archives (quelques documents subsistent aux Archives départementales) c’est une unique lettre patente d’octobre 1478 où Louis XI déclare : « (nous) remectons et restituons en notre dite grâce et en leur bonne fame (réputation) et renommée » la ville et les gens de Beaune. Cette même lettre confirme cependant certaines peines infligées à la ville comme le versement de 40 000 livres au trésor royal et la cession de vins aux marchands parisiens.

Archives disparues ?
Le siège de la commune est assez mal documenté. Certaines pièces manquent, et elles ont probablement disparu dès l’époque des faits. De même, si nos historiens et érudits locaux sont prolixes sur d’autre siège comme par exemple celui de 1595, l’épisode du soulèvement des Beaunois pour leur duchesse n’a pas fait l’objet de beaucoup d’études. Par exemple, Jean Robert de Chevanne (Membre de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Beaune) écrit dans les années 1930 un récit assez lacunaire sur l’événement et semble se plaindre du manque de sources d’époque. Dans les diverses Histoire de Beaune publiées depuis le XVIIIe siècle, la mésaventure ne fait qu’une poignée de lignes. Les détails ne nous sont que partiellement connus.
Ce siège a pourtant profondément marqué la ville : comme à Dijon, on fit construire dans les années qui suivirent un puissant château, aussi bien pour défendre la frontière passant sur la Saône que pour projeter sur l’ancienne ville rebelle l’ombre menaçante des canons du Roi.
Merci à toute l’equipe des Archives ! Amitiés !
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Merci de votre soutien qui nous va droit au cœur !
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