Le 6 décembre est la date traditionnelle de la fête de l’un des saints les plus populaires de la Chrétienté : le bon Saint Nicolas. Les miracles qui lui sont attribués font de Nicolas le saint patron des enfants, des jeunes filles, de la Lorraine, des étudiants, des célibataires, des prisonniers, des marins… À Beaune, comme en réalité dans de nombreuses villes et villages, Saint Nicolas est présent à plusieurs coins de rues.
Le Faubourg Saint Nicolas
Le faubourg Saint-Nicolas fut longtemps nommé dans les actes faubourg du Bourgneuf. Son origine remonte à 1174 lorsqu’Hugues III fait don d’une terre quasi vierge à Gérard de Réon1. Ce dernier a alors l’obligation de faire émerger un village de cette terre inculte. Cette donation n’est pas exceptionnelle, en effet l’Europe d’alors connait une période de prospérité. Le climat est favorable, les récoltes sont donc généralement abondantes. La population augmente et les villes médiévales débordent de leurs murailles : le Faubourg Saint-Nicolas est un cas typique de ce mouvement qui touche tout l’Occident. Ce faubourg est rapidement habité par une population modeste, travaillant principalement dans la vigne. Lieu de passage, c’est ici que s’installent un grand nombre d’auberges mais aussi des tavernes pour les voyageurs. Ces activités ont marqué la forme des maisons le long de la Route de Dijon. Le nom du faubourg vient du saint patron de l’église si remarquable de Saint-Nicolas.
L’Église Saint-Nicolas
Les évolutions de la piété populaire et des pratiques religieuses se lisent dans l’architecture et le mobilier de Saint-Nicolas. Église paroissiale d’un faubourg modeste, elle a gardé une rusticité mais aussi une unité de style très particulière2. Une première église fut projetée dès la création du faubourg mais n’a dû être achevée qu’au cours du XIIIe siècle. Elle subit les troubles de la fin du Moyen Age (Guerre de Cent ans, Grande peste) et est en ruine. De la première église ne subsistent aujourd’hui que la porte et le soubassement des murs. Elle est reconstruite au XIVe siècle, sobre, mais avec des inspirations gothiques. L’édifice a la particularité d’avoir conservé son porche d’entrée alors que bon nombre d’églises ont perdu le leur. Imaginez aussi que, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, il y avait tout autour de l’église, un mur qui délimitait le cimetière de Saint Nicolas.
Si l’église n’est pas détruite à la Révolution, elle manque d’entretien durant la période. Nous possédons les comptes des années 18203 qui montrent que la charpente menaçait de s’effondrer sous le poids de sa couverture en laves. Le XIXe siècle fut aux petits soins pour cette église. On refait les vitraux, on met en place un nouvel autel, la façade est ravalée et le toit refait plusieurs fois. Entrons maintenant dans l’église. On remarque au sol et contre les murs les pierres tombales des notables du faubourg (les plus anciennes inscriptions datent du XVIIe siècle). Au XVIIIe siècle on ajoute deux autels dans le transept dont l’un dédié à Saint Nicolas représentant la légende de la résurrection des 3 petits enfants. En 1813, on installa un nouvelle autel central mais malheureusement, le dessin du projet cité dans le devis n’a pas été conservé. Comme dans beaucoup d’églises, les changements dans la célébration de la messe après Vatican II (1962) ont entrainé des modifications dans l’agencement de l’intérieur, notamment l’ajout d’un nouvel autel.

Mais bien encore des mystères
Les petites chroniques que les Archives vous offrent chaque semaine sont tirées de la lecture des archives de la ville et des écrits des érudits et savants locaux qui fouillent le passé de Beaune depuis le XIXe siècle4. Cependant, un grand nombre d’archives concernant Beaune sont conservées dans d’autres lieux, notamment celles du Chapitre de la Collégiale5 dont dépendaient les paroisses de la commune. Et je dois avouer que l’écriture du récit de cette quinzaine a fait apparaître plus de questions que de réponses. L’histoire de Saint-Nicolas reste encore à faire, comme la plupart des anciennes églises paroissiales aujourd’hui disparues. Plus que jamais, affaire à suivre…
Tiré de l’article paru dans l’Echo des Coms n°280 du 6 décembre 2022 – Archives de Beaune
1 Voir le dossier G 2733 aux Archives départementales de la Côte d’Or : Hugues III, duc de Bourgogne : ratification de la donation de la Champagne de Beaune faite au Chapitre par Gérard de Réon, son familier (Beaune, 1174). – Confirmations, par G., archevêque de Lyon, légat apostolique (1174) ; – par Eudes, fils du duc Hugues (s.d. ; [1174-1175]) ; – par le même, duc de Bourgogne (s.d. ; [1192-1218]). – plusieurs copies du présent dossier (XVIe-XVIIe siècle), y compris 2 bulles du pape Alexandre III (Feretino, 23 février [1174/5], et Anagni, 27 septembre [1176]). – Note sur le droit du Chapitre sur la Champagne (1693).
2. Cette article est en grande partie basé sur Joseph Délissey, « Église Saint-Nicolas » in Le Vieux Beaune, Beaune, Imprimerie Mad. Girard, 1941, p. 209-222.
3. Dossier de l’église Saint Nicolas, contenant les pièces des travaux entre 1790 et 1988, 2 M 2, AMB.
4. Par exemple, il est intéressant de consulter sur le sujet Le Vieux Beaune de Joseph Délissey qui, par son rôle de secrétaire général de la Mairie de Beaune, à largement dépouillé les fonds des archives municipales. A la lecture de son livre on peut soupçonner qu’il a aussi consulté tout ou partie des archives départementales disponibles.
5. Les archives du Chapitre de la Collégiale Notre-Dame sont en grande partie conservées aux Archives départementales de la Côte d’Or (cote G 2469 à G 2945. Pour les documents concernant Saint Nicolas voir G 2834 à G 2837)