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Théâtre municipal

Au Moyen-Age, chaque année à l’Épiphanie, on représentait le Mystère des Trois Rois ; un chanoine tenait le rôle d’Hérode. Aux XVII et XVIII° siècles, on jouait (selon une tradition) au Cul-de-Four, au-dessus d’une boulangerie, rue du Sauvage (entre la Place au Beurre et la rue Paradis) puis dans une salle servant au jeu de paume (rue de Lorraine, entre la rue Sainte Marguerite et l’École des Beaux-Arts).

Les Oratoriens donnaient des représentations pour la distribution des prix, comédies ou tragédies sans doute assez analogues aux pièces classiques. En 1768 ils donnèrent : « Beaune victime de son amour pour son Roi » (Henri IV, en 1595).

Les premières salles de théâtre
La Comédie

En 1766, Jean DELAUTEL obtint la permission de construire et de gérer une salle de théâtre, qui allait mettre BEAUNE à égalité avec des villes plus importantes. La salle existe encore rue Spuller, on y voit les attributs de la comédie, rappelant l’origine dionysiaque du drame. Ils sont de SWALEM (sculpteur) et BONNET(menuisier). La salle fut restaurée en 1831. Elle comportait 540 places. Abandonnée, elle servit de gymnase. En 1896, on la réaménagea en particulier pour des conférences. Elle sert aujourd’hui d’entrepôt.

Le Vauxhall

c’était un lieu public où on donnait des bals et des concerts. Le premier établissement de ce nom fut construit à Londres. Celui de BEAUNE est de 1805. Installé sur le bastion Saint Nicolas, il fut démoli en 1860 pour la construction du théâtre. En 1858, on y donna « Mère et fille » de Xavier FORNERET.

Le Théâtre Municipal

L’ancienne salle était incommode, on n’y pouvait pas représenter de pièces à grand spectacle. Le devis fut fait en 1859 par Félix GOIN. Le théâtre avait 600 places : un parterre (places populaires), l’orchestre et deux rangs de stalles au bas, deux étages de loges et un troisième étage (galerie). Les décors furent demandés à des peintres décorateurs de PARIS. Ils devaient fournir aussi bien une forêt qu’une place publique, une prison que des salons divers, une montagne ou un prie-Dieu gothique. Plus la « peinture d’art » du rideau, des galeries, du plafond.

 L’inauguration eut lieu le 6 décembre 1862. Sauf un prologue de circonstance, la représentation était quelconque. L’éclairage (au gaz) était un peu faible et le foyer non meublé. Le « Journal de BEAUNE » admira la décoration sobre et de bon goût. Au-dessus des trois galeries, tapissées d’un fond rouge- clair, et dont les devants blanc et or sont ornés, suivant les étages, d’entrelacs, de cartouches et de médaillons en camaïeu reliés par des guirlandes de fleurs, le plafond porté sur des voussures, s’élève comme un dôme d’azur pâle entouré d’une balustrade fleurie et coupé de treillages à jours.

Les loges d’avant-scène, encadrées par des pilastres et plus mouvementées que celles des galeries, sont drapées de velours dont la couleur pourpre tranche vigoureusement sur les devants blanc et or de style néo-grec comme l’ensemble de la salle. Les deux loges à salon des premières nous offrent, au milieu de l’enroulement de leurs rinceaux, deux médaillons dus au pinceau brillant et habile d’Hippolyte MICHAUD, et représentant sur fond or, les figures de la Tragédie et de la Comédie (la tragédie, c’est Madame FAVART).

Voici le rideau : Entre les plis opulents d’une draperie pourpre à demi ouverte et rehaussée d’une riche crépine d’or, se déroule une sorte de tapisserie à fond gris perle, entourée d’ornements dans le goût du siècle dernier ; au centre, se détache un cippe de marbre blanc, dont la base est jonchée d’attributs scéniques ; sur le chapiteau s’ébattent deux colombes aux ailes frémissantes. Des plis magistralement dessinés partant des frises de l’avant-scène, viennent s’attacher à un écusson timbré d’un raisin et portant pour légende ces mots qui figuraient autrefois, nous dit-on, dans les armoiries de BEAUNE : Causa nostrae Laetitiae.

Règlement de police

 Le théâtre étant un lieu public, il devait être l’objet d’une surveillance attentive. On surveillait les spectateurs, on surveillait les acteurs, le Directeur et les machinistes. Notons que les dames (sauf cas de représentations pour elles) n’étaient pas admises au parterre, places populaires où on aurait pu les traiter sans respect. A l’orchestre, elles devaient ôter leurs chapeaux (cf. mode de l’époque). Quant aux filles soumises, elles devaient demander l’autorisation d’aller au théâtre au commissaire de police qui leur assignait une place. Le foyer leur était interdit.

Le répertoire

Il y avait des troupes de passage et parfois des saisons avec un directeur (ou une directrice) et une troupe capable de jouer comédie, drame ou opérette. On donnait un échantillon de tout ce qui se faisait : opéras, opérettes, classiques français (de CORNEILLE à Victor HUGO), théâtre moderne (DUMAS fils, SARDOU, MIRBEAU, ROSTAND), pour ainsi dire pas de pièces étrangères. Les pièces à grand spectacle ne manquaient pas. Dans « La Veuve », on annonça même une guillotine sur scène. On joue des revues sur BEAUNE, on accueille des chansonniers (Le Chat Noir, POLIN, MAYOL, Les BRUET-RIVIERE) et même des prestidigitateurs.

Les spectateurs étaient copieux : pour finir à minuit on devait parfois commencer à 7heurs et demie. C’était plus généralement 8 heurs. Dans les grandes occasions on augmentait le prix des meilleurs places qui passaient de 2.50 F à 3F, 4 F, voire même 6 F. Cette dernière fois, il s’agissait de deux comédiens français, FAVART et COQUELIN cadet, célèbre dans ses monologues.

Depuis la Grande Guerre

Du point de vue matériel, le théâtre se ressentit de son âge. Monsieur Pierre ROUSSEAU, qui avec son ami Pierre BLINE anima tant de soirées, se souvient comme spectateur de sièges inconfortables, comme acteur des vents coulis de la scène, du plateau gondolant et du rideau qui avait de la peine à se lever. La municipalité essayait de parer au vieillissement : rafraîchissement de décors, installation de l’électricité en 1918 et renforcement de l’éclairage de scène en 1926.

La grande étape fut en 1934 quand on installa le cinéma « Rex ». On supprima les loges et on les remplaça par des rangées de fauteuils confortables. Le répertoire, en théorie, resta le même. En pratique, les horaires du cinéma restreignaient la liberté des tournées ou des représentations locales. Dès après 1918, l’opéra devenait trop coûteux et les pièces à grand spectacles étaient concurrencées par les films.

Pour l’entre-deux-guerres, il faut citer les tournées BARET, la troupe de jeanne DESCLOS, veuve de Lucien GUITRY et propriétaire à MELOISEY et de nombreux acteurs de passage, Cécile SOREL ou Marguerite MORENO, Pierre BRASSEUR ou Henri GARAT.  Parmi les chanteurs : Charles TRÉNET ou Jean LUMIERE, Berthe SYLVA et plus tard Line RENAUD. Il y eut toujours des concerts au théâtre, généralement donnés par des sociétés locales auxquelles s’adjoignaient des solistes venus de l’extérieur. Parmi les artistes locaux, il faut citer Léon RATHEAUX et ses filles. Après 1918, on fit une large place aux chansons bourguignonnes de Maurice EMMANUEL. Des soirées récréatives mêlaient musique et théâtre, ainsi « On purge bébé » (avec Pierre ROUSSEAU dans le rôle principal) comme intermède en 1926. Cela pouvait aller jusqu’à la gymnastique (pour les Fils de France) ou même à la boxe. On entendit des conférenciers et des académiciens.

Pour les années plus récentes, ce furent le Théâtre de Bourgogne, Raymond DEVOS, Les Frères Jacques… Dans les années soixante-dix, le cinéma constitue l’activité essentielle du lieu jusqu’en 1984 où le fond de cinéma est racheté par un privé qui regroupe l’ensemble des salles sur un même site.

De 1985 à 1989, la Ville entreprend une restauration à l’identique et dote le théâtre d’un équipement technique répondant aux exigences actuelles. Le 23 février 1989, le public découvre enfin les tons bleu, blanc et or de la salle et le rideau s’ouvre sur « La Vie Parisienne » : qui, mieux que Jacques OFFENBACH, pouvait redonner vie à ce splendide théâtre à l’italienne ?

D’après François MORTUREUX.

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Petit vocabulaire de théâtre …

Brigadier : Grade donné au machiniste. Morceau de perche souvent garni de velours et de clous dorés utilisé par le régisseur pour frapper les trois coups.

Courrier : Machiniste travaillant à cour.

Jardinier : Machiniste travaillant à jardin.

Toucher un feu : Indemnité que perçoit un machiniste lorsqu’il paraît sur scène en vue du public.

Changement à vue : Exécuté à la vue du public.

Changement au noir : Exécuté sans lumière. Pour bien exécuter ce travail très délicat, il suffit, quelques minutes avant le changement, d’habituer sa vue au noir en se bouchant les yeux. Lorsque la lumière s’éteint, le machiniste voit dans le noir alors que le spectateur est encore ébloui.

Conduite sur scène : Livre de scène sur lequel le régisseur technique a noté  les indications, consignes, manœuvres réglées par le metteur en scène.

Console : Pupitre de commande de la cabine de son.

Jeu d’orgue : Au XIX° siècle, les théâtres sont éclairés au gaz. Le pupitre où sont assemblées toutes les commandes de gaz a l’apparence d’un instrument de musique : l’orgue avec tous ses tuyaux plus ou moins gros, plus ou moins longs. D’où le surnom de jeu d’orgue donné au pupitre de commande des lumières.

Corde à piano : Fil d’acier de forte résistance utilisé dans les équipes.

Au théâtre, on emploie jamais le mot « corde » (à part corde à piano). Le vocabulaire est largement emprunté à celui de la marine à voile : drisse, cordage, élingue, fils, guinde, mât, soutier…

Arlequin : Le manteau d’arlequin est composé de trois parties mobiles. De chaque côté, les draperies verticales sont coiffées par la frise horizontale pour réduire le cadre à volonté.

Rideau à la polichinelle : Équipe (soutien ou accrochage) d’un rideau lorsque la hauteur est nulle, le rideau se roulant sur lui-même par le bras.

Lambrequin :  Sorte de frise décorative fixe et rigide placée devant le rideau d’avant-scène.

Couturière : Dernière répétition avant la « première ».

Servante :  Se dit d’une baladeuse lorsque le plateau est au noir et qu’elle est seule à fournir un point lumineux de sécurité.

Mère de famille : Flasque avec plusieurs poulies sur le même axe pour rassembler plusieurs fils sur le même point.

Patience : Appareil permettant d’ouvrir ou de fermer les rideaux.

Pain : Poids de fonte rond ou rectangulaire servant à contre balancer une charge.

Galette : Poids de fonte égal à un demi pain.

Boîte à sel : Guichet de la caissière.

Gélatines : Feuilles de plastique transparentes et de couleur différentes placées devant les projecteurs pour colorer la lumière.

Gril : Partie haute de la scène où se trouve l’appareillage en super-structure de toute la machinerie.

Paradis : Le plus élevé des balcons, également appelé « poulailler ». C’est là que souvent se trouvait la « claque ».

Claque : Personnes placées dans la salle, mélangées aux spectateurs et payées pour applaudir (inusité au Théâtre de BEAUNE…).

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