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A bas les gants blancs !

Le service des Archives municipales de Beaune vous présente ses meilleurs vœux pour l’année 2024. Cette année, dans notre chronique bimensuelle, tout en continuant à vous faire découvrir des archives et des épisodes de l’histoire locale, nous nous attacherons à vous faire mieux connaitre le métier et les coulisses des Archives. Et nous allons commencer par détruire une image d’Épinal : les gants blancs sont l’ennemi des archives !

Caresses à mains nues

Contrairement à ce que la télévision a grand plaisir à nous montrer, porter des gants pour manipuler des documents anciens est plus néfaste que protecteur. En effet, en portant des gants l’on perd une certaine dextérité et le risque de déchirer le papier est plus grand, notamment les papiers à base de pâte de bois du XIXe siècle ou ceux ayant un jour pris l’eau. De plus, les gants blancs sont souvent en coton non lisse : ils accrochent les papiers fragiles qui partent en poussière. Le coton retient aussi des impuretés ou des champignons qui vont se redéposer sur d’autres documents dans le cas où les gants servent plusieurs fois. Vous l’aurez compris, les gants sont à proscrire. L’on conseille simplement à nos lecteurs voulant consulter des parchemins d’avoir les mains bien lavées et bien sûr de ne pas s’humidifier les doigts pour tourner les pages…

Les parchemins ont la peau dure

Il faut aussi casser un autre mythe : les documents anciens ne sont pas les plus fragiles. Les archivistes veillent à ce que les chartes, ordonnances, registres de compte soient protégés au maximum de la lumière et des gros écarts de température et d’humidité. Cependant, ces documents, dont les plus vieux à Beaune ont 820 ans, sont finalement souvent les plus costauds. Au Moyen-Âge, les papyrus, utilisés sur tout le pourtour de la Méditerranée pendant toute l’Antiquité, sont remplacés par le parchemin. Ce dernier, qui est une peau de bête, le plus souvent de chèvre ou de mouton, est très solide (on utilise aussi du veau mort-né pour les documents les plus prestigieux à cause de sa blancheur, le vélin). Le Parlement britannique a gardé la tradition de conserver un exemplaire de chaque loi votée sur du parchemin : et d’ailleurs, dans une compétition sur le temps long entre parchemin et numérique, je ne parierais pas sur le numérique…

On utilisait aussi pour les documents de moindre importance du papier chiffon réalisé à partir de fibres de chiffons en lin et en chanvre. Ce papier est là encore très résistant au passage du temps.

En revanche, à partir du XIXe siècle, les papiers à base de cellulose s’imposent, même s’ils sont bien moins solides : l’encre noire des écritures et ce papier issu de pâte de bois réagissent très mal l’un avec l’autre. Les journaux et affiches officiels, par principe éphémères, sont les documents les plus difficiles à conserver sur le temps long.

Quelques exceptions

Trace de pouce sur une plaque photographique en verre de 1900, AMB.

Il existe quelques exceptions à l’usage des gants : les objets et les photographies. Si les papiers et encres résistent bien au pH des mains humaines, les bronzes ou les plaques de verre (ancêtres de la photographie) vivent assez mal le contact de nos doigts. Aujourd’hui on préconise l’usage de gants en nitrile, matière plastique neutre qui offre une bonne dextérité et une excellente hygiène.

Nous ne sommes pas les seuls à le dire…

La Bibliothèque national de France sur son site internet dans un article intitulé Faut-il porter des gants blancs pour manipuler des ouvrages précieux ? présente les raisons qui s’appliquent aussi à la consultation des livres anciens. Et cette pratiques on la retrouve pas qu’en France la Bibliothèque et Archives Canada avance les mêmes arguments, comme au Archives municipales de Toulouse


Tiré de l’article paru dans l’Echo des Coms n°305 du 9 janvier 2023 – Archives de Beaune – Mathias Compagnon


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